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RAPHAËL

que l’élection, stimulant perpétuel au service du pays et récompense temporaire du mérite ou de la vertu des citoyens.

XCVIII

Julie, à qui j’avais prêté ce manuscrit pour la mettre de moitié dans mes travaux comme dans ma vie, l’avait fait lire à un homme distingué de sa société intime, pour le jugement duquel elle avait une extrême déférence. C’était M. Mounier, digne fils de l’illustre membre de l’Assemblée constituante, longtemps secrétaire particulier de l’empereur, alors royaliste constitutionnel, un de ces esprits qui n’ont point de jeunesse, qui naissent mûrs et qui meurent jeunes en laissant un grand vide dans leur temps.

M. Mounier, après avoir lu mon travail, demanda à Julie quel était l’homme politique qui avait écrit ces pages. Elle sourit : elle lui avoua que c’était l’œuvre d’un très-jeune homme qui n’avait ni nom, ni expérience, ni antécédents dans les affaires. M. Mounier voulut me voir.

Je lui fus présenté. Il me voua une bienveillance qui devint depuis de l’amitié et qui ne s’est pas démentie jusqu’à son lit de mort. Je n’imprimai pas ce travail ; mais M. Mounier me présenta à son ami, M. de Rayneval, esprit lumineux, cœur ouvert, intelligence attrayante et enjouée, quoique laborieuse et grave. M. de Rayneval était alors l’âme de nos affaires étrangères. Il est mort ambassadeur à Madrid. M. de Rayneval, qui avait lu mon travail, m’accueillit dans sa maison avec cette grâce encourageante et avec ce sourire cordial qui suppriment la distance et qui enlèvent du premier regard le cœur d’un jeune homme. C’était un de ces hommes de qui on aime à apprendre parce