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« Nous n’avons plus que les miracles pour nous, me dit-il en descendant l’escalier, et la nature ne les multiplie pas ; si je le trouve aussi mal ce soir, il sera temps de dire à ce pauvre jeune homme de songer à ses dernières dispositions. »

Je fis quelques pas avec mon ami dans la rue, et je rentrai triste, pour Geneviève et pour l’enfant, du pronostic du médecin.

A peine étais-je rentré dans la cour de l’auberge que les grelots d’un mulet des montagnes se firent entendre derrière moi. En me retournant, je vis un vieillard encore vert, un long bâton avec le pommeau garni de lanières tressées de cuir à la main, qui menait par la bride un petit mulet sur le bât duquel était assise une jeune paysanne d’environ vingt-six ans. Geneviève avait reconnu avant moi le son des grelots et pressenti le père la Cloche. Elle était déjà sur l’escalier, se précipitant au-devant de lui avec l’enfant. Elle dit bonjour au vieillard, pendant que l’enfant, qui la devançait et qui avait reconnu sa mère, se jetait en fondant en larmes dans les bras de la jeune paysanne.


CXLIV


C’était une charmante tête de Greuze, ce peintre qui, né sous la chaumière, a surpris le mieux, après Raphaël, la Vénus rustique, la beauté champêtre, la simplicité, la grâce et la candeur de visage des jeunes filles et des enfants des hameaux. Le frère de Greuze était curé d’une des terres de mon grand-père ; quand le Raphaël des paysans venait passer des jours d’été dans sa famille, le curé amenait le