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faire, tant j’étais bouleversée et tant les jambes me manquaient sous moi !

« Pourtant, le soir, la sage-femme vint et me dit avec un coup d’œil de reproche et d’intelligence :

« — Est-il possible, mam’selle Geneviève, que vous portiez si injustement tant d’affronts que vous ne méritez pas, et que vous ne me rendiez pas le serment que je vous ai fait ?

« — Non, lui dis-je, mère Bélan, je ne vous le rendrai jamais, jamais, à aucun prix.

« — Et pourquoi cette obstination ? reprit-elle.

« — Parce que les vivants, voyez-vous, que je lui dis, ça peut supporter ; mais les âmes des morts, ça ne peut se défendre !

« — Et qu’allez-vous faire maintenant ? me dit en croisant ses mains sur son tablier la pauvre femme.

« — Je vais aller, quand il sera nuit, demander asile à ma sœur de père. »

« Elle hocha la tête et s’en alla. Puis elle revint et me dit :

« — Quand vous n’aurez plus de pain, mam’selle Geneviève, souvenez-vous qu’il y en a toujours pour vous à la maison ! »


LXXXIII


« — En effet, monsieur, quand la rue fut déserte et aussi vide que la boutique, et qu’il fit tout à fait nuit, j’allai sonner à la porte de ma sœur de père, la seule qui me restât ; l’autre était partie de Voiron ; elle n’était pas méchante ; mais, je vous l’ai dit, ces deux sœurs-là, du premier lit,