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C’est toi dont la pitié plus tendre
Verse l’aumône à pleines mains,
Guide l’aveugle, et vient attendre
Le voyageur sur les chemins ;
C’est toi qui, dans l’asile immonde
Où les déshérités du monde
Viennent pour pleurer et souffrir,
Donne au vieillard de saintes filles,
À l’enfant sans nom des familles,
Au malade un lit pour mourir !

Tu vis dans toutes les reliques ;
Temple debout et renversé,
Autels, colonnes, basiliques,
Tout est à toi dans le passé !
Tout ce que l’homme élève encore,
Toute demeure où l’on adore,
Tout est à toi dans l’avenir !
Les siècles n’ont pas de poussière,
Les collines n’ont pas de pierre
Qui ne porte ton souvenir.

Enfin, vaste et puissante idée,
Plus forte que l’esprit humain,
Toute âme est pleine, est obsédée
De ton nom qu’elle évoque en vain !
Préférant ses doutes funèbres,
L’homme amasse en vain les ténèbres,
Partout ta splendeur le poursuit ;
Et, comme au jour qui nous éclaire,
Le monde ne peut s’y soustraire
Qu’en se replongeant dans la nuit !