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Chaque jour à son siècle apporte son trésor ;
Les éléments soumis ont reconnu leur maître,
Et l’univers vieilli rêve qu’il voit renaître
Un dernier âge d’or… »




Et toi qui, relevant les débris des couronnes,
Viens du trône des rois embrasser les colonnes,
Rêve des nations, qu’ont vu passer nos yeux,
Que le Christ après lui fit descendre des cieux !
Liberté ! dont la Grèce a salué l’aurore,
Que d’un berceau de feu ce siècle vit éclore,
Viens, le front incliné sous le sceptre des rois,
Poser le sceau du peuple au livre de nos lois !
Trop longtemps l’univers, lassé de tes orages,
Aux mains des factions vit flotter tes images ;
Trop longtemps l’imposture, usurpant ton beau nom,
De ses honteux excès fit rougir la raison :
L’univers cependant, effrayé de lui-même,
T’invoque et te maudit, t’adore et te blasphème,
Et, comme un nouveau culte aux humains inspiré,
Ne peut fixer encor ton symbole sacré !
Je ne sais quel instinct, plus sûr que l’espérance,
Présage aux nations ton règne qui s’avance :
L’opprimé, l’oppresseur, te rêvent à la fois ;
Un peuple enseveli ressuscite à ta voix ;
Le voile qui des lois couvrait le sanctuaire
Se déchire, et le jour de tes yeux les éclaire.
Les partis triomphants, si prompts à t’oublier,
Se couvrent de ton nom comme d’un bouclier ;
Chaque peuple à son tour te possède ou t’espère,
Et ton œil cherche en vain un tyran sur la terre !