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du côté du nord. Les étrangers et les paysans en coupent parfois des branches, en mémoire de ma mère ; mais il en repousse suffisamment pour couvrir tout un champ des morts.

En écrivant cette note, je ne puis m’empêcher de faire un triste retour sur les vicissitudes de la vie. Le lierre restera attaché à cette maison ; et les enfants seront forcés de la quitter pour jamais. Milly sera sans doute vendu dans peu de jours.

Chose étrange ! le jour où j’écris cette note (24 octobre 1849), j’ouvre un journal, et j’y lis ceci : « La Porte Ottomane fait une concession immense de terrain en Asie à M. de Lamartine, pour un établissement agricole. » Si cela est vrai, j’irai ; j’y bâtirai un toit, je l’appellerai Milly ; j’y emporterai un rejet de ce lierre, je le planterai dans ce sol, et je retrouverai dans ses feuilles cette séve des larmes du cœur de ma mère, le faux Simoïs de Virgile !