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Dans un mot de feu, Liberté !
Puis, dégoûté de son ouvrage,
D’un mot qui tonne davantage
Il réveille l’humanité !

Et tout se fond, croule ou chancelle ;
Et, comme un flot du flot chassé,
Le temps sur le temps s’amoncelle,
Et le présent sur le passé !
Et sur ce sable où tout s’enfonce,
Quoi donc, ô mortels, vous annonce
L’immuable que vous cherchez ?
Je ne vois que poussière et lutte,
Je n’entends que l’immense chute
Du temps qui tombe, et dit : « Marchez ! »


III


Marchez ! l’humanité ne vit pas d’une idée !
Elle éteint chaque soir celle qui l’a guidée,
Elle en allume une autre à l’immortel flambeau :
Comme ces morts vêtus de leur parure immonde,
Les générations emportent de ce monde

Leurs vêtements dans le tombeau.


Là c’est leurs dieux ; ici les mœurs de leurs ancêtres,
Le glaive des tyrans, l’amulette des prêtres,
Vieux lambeaux, vils haillons de cultes ou de lois :
Et quand après mille ans dans leurs caveaux on fouille,
On est surpris de voir la risible dépouille

De ce qui fut l’homme autrefois.