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On lui jeta de l’eau sur le visage. On l’appela de toutes les voix qui lui étaient les plus chères. Elle ne revint au sentiment qu’à ma voix. « Tu le vois, me dit mon ami, elle vit ; le coup est porté. De plus longs adieux ne seraient que des contrecoups plus terribles. » Il décolla les deux bras glacés de la jeune fille de mon cou et m’arracha de la maison. Une heure après, nous roulions dans le silence et dans la nuit sur la route de Rome.


XXXIV


J’avais laissé plusieurs adresses à Graziella dans la lettre que je lui avais écrite. Je trouvai une première lettre d’elle à Milan. Elle me disait qu’elle était bien de corps, mais malade de cœur ; que cependant elle se confiait à ma parole et m’attendrait avec sécurité vers le mois de novembre.

Arrivé à Lyon, j’en trouvai une seconde plus sereine encore et plus confiante. La lettre contenait quelques feuilles de l’œillet rouge qui croissait dans un vase de terre sur le petit mur d’appui de la terrasse, tout près de ma chambre, et dont elle plaçait une fleur dans ses cheveux le dimanche. Était-ce pour m’envoyer quelque chose qui l’eût touchée ? Était-ce un tendre reproche déguisé sous un symbole et pour me rappeler qu’elle avait sacrifié ses cheveux pour moi ?

Elle me disait qu’elle « avait eu la fièvre ; que le cœur lui faisait mal ; mais qu’elle allait mieux de jour en jour ; qu’on l’avait envoyée, pour changer d’air et pour se remettre tout à fait, chez une de ses cousines, sœur de