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depuis quelque temps à la jeune fille son fils aîné, cousin de Graziella, jeune homme de vingt ans, sage, modeste, rangé, ouvrier d’élite, mais simple d’esprit, rachitique et un peu contrefait dans sa taille. Il venait le soir, après la fermeture de la fabrique, examiner le travail de sa cousine, la perfectionner dans le maniement des outils et lui donner aussi les premières leçons de lecture, d’écriture et de calcul. « Espérons », me dit tout bas la grand-mère pendant que Graziella détournait les yeux, « que cela tournera au profit des deux, et que le maître deviendra le serviteur de sa fiancée. » Je vis qu’il y avait une pensée d’orgueil et d’ambition pour sa petite-fille dans l’esprit de la vieille femme. Mais Graziella ne s’en doutait pas.


X


La jeune fille me mena par la main dans sa chambre, pour me faire admirer les petits ouvrages de corail qu’elle avait déjà tournés et polis. Ils étaient proprement rangés sur du coton dans de petits cartons sur le pied de son lit. Elle voulut en façonner un morceau devant moi. Je faisais tourner la roue du petit tour avec le bout de mon pied, en face d’elle, pendant qu’elle présentait la branche rouge de corail à la scie circulaire qui la coupait en grinçant. Elle arrondissait ensuite ces morceaux, en les tenant du bout des doigts, et en les usant contre la meule.

La poussière rose couvrait ses mains, et, volant quelquefois jusqu’à son visage, saupoudrait ses joues et ses lèvres d’un léger fard, qui faisait paraître ses yeux plus