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XVIII


En parlant ainsi, nous descendions légèrement les rues en pente de Procida. Nous arrivâmes bientôt sur la marine. C’est ainsi qu’on appelle la plage voisine de la rade ou du port dans l’archipel et sur les côtes d’Italie. La plage était couverte de barques d’Ischia, de Procida et de Naples, que la tempête de la veille avait forcées de chercher un abri dans ses eaux. Les marins et les pêcheurs dormaient au soleil, au bruit décroissant des vagues, ou causaient par groupes assis sur le môle. À notre costume et au bonnet de laine rouge qui recouvrait nos cheveux, ils nous prirent pour de jeunes matelots de Toscane ou de Gênes qu’un des bricks qui portent l’huile ou le vin d’Ischia avait débarqués à Procida.

Nous parcourûmes la marine en cherchant de l’œil une barque solide et bien gréée, qui pût être facilement manœuvrée par deux hommes, et dont la proportion et les formes se rapprochassent le plus possible de celle que nous avions perdue. Nous n’eûmes pas de peine à la trouver. Elle appartenait à un riche pêcheur de l’île, qui en possédait plusieurs autres. Celle-là n’avait encore que quelques mois de service. Nous allâmes chez le propriétaire, dont les enfants du port nous indiquèrent la maison.

Cet homme était gai, sensible et bon. Il fut touché du récit que nous lui fîmes du désastre de la nuit et de la désolation de son pauvre compatriote de Procida. Il n’en perdit pas une piastre sur le prix de son embarcation ;