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qua qu’il était de Procida ; qu’il possédait encore sur cette côte de l’île la cabane et le jardin de son père, et qu’en ce moment même sa femme âgée avec sa petite-fille, sœur de Beppino, notre jeune mousse, et deux autres petits-enfants, étaient dans sa maison, pour y sécher les figues et pour y vendanger les treilles dont ils vendaient les raisins à Naples. « Encore quelques coups de rame, ajouta-t-il, et nous boirons de l’eau de la source, qui est plus limpide que le vin d’Ischia. »

Ces mots nous rendirent courage ; nous ramâmes encore pendant l’espace d’environ une lieue le long de la côte droite et écumeuse de Procida. De temps en temps, l’enfant élevait et secouait sa torche. Elle jetait sa lueur sinistre sur les rochers, et nous montrait partout une muraille inabordable. Enfin, au tournant d’une pointe de granit qui s’avançait en forme de bastion dans la mer nous vîmes la falaise fléchir et se creuser un peu comme une brèche dans un mur d’enceinte ; un coup de gouvernail nous fit virer droit à la côte, trois dernières lames jetèrent notre barque harassée entre deux écueils, où l’écume bouillonnait sur un bas-fond.


XII


La proue, en touchant la roche, rendit un son sec et éclatant comme le craquement d’une planche qui tombe à faux et qui se brise. Nous sautâmes dans la mer, nous amarrâmes de notre mieux la barque avec un reste de cordage, et nous suivîmes le vieillard et l’enfant qui marchaient devant nous.

Nous gravîmes contre le flanc de la falaise une espèce