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ressemble à une coupe de vert antique qui blanchit d’écume, et dont le lierre et le pampre festonnent les anses et les bords ; c’était la saison où les pêcheurs du Pausilippe, qui suspendent leur cabane à ses rochers et qui étendent leurs filets sur ses petites plages de sable fin, s’éloignent de la terre avec confiance et vont pêcher la nuit à deux ou trois lieues en mer jusque sous les falaises de Capri, de Procida, d’Ischia, et au milieu du golfe de Gaëte.

Quelques-uns portent avec eux des torches de résine, qu’ils allument pour tromper le poisson. Le poisson monte à la lueur croyant que c’est le crépuscule du jour. Un enfant, accroupi sur la proue de la barque, penche en silence la torche inclinée sur la vague, pendant que le pêcheur, plongeant de l’œil au fond de l’eau, cherche à apercevoir sa proie et à l’envelopper de son filet. Ces feux, rouges comme des foyers de fournaise, se reflètent en longs sillons ondoyants sur la nappe de la mer comme les longues traînées de lueurs qu’y projette le globe de la lune. L’ondoiement des vagues les fait osciller et en prolonge l’éblouissement de lame en lame aussi loin que la première vague les reflète aux vagues qui la suivent.


III


Nous passions souvent, mon ami et moi, des heures entières, assis sur un écueil ou sur les ruines humides du palais de la reine Jeanne, à regarder ces lueurs fantastiques et à envier la vie errante et insouciante de ces pauvres pêcheurs.

Quelques mois de séjour à Naples, la fréquentation habituelle des hommes du peuple pendant nos courses de