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Elle nourrit les tourterelles,
Sur le blanc satin de leurs ailes
Promène ses doigts caressants ;
Ou, dans un amoureux caprice,
Elle aime que leur cou frémisse
Sous ses baisers retentissants.

Elle paraît, et tout soupire,
Tout se trouble sous son regard ;
Sa beauté répand un délire
Qui donne une ivresse au vieillard ;
Et, comme on voit l’humble poussière
Tourbillonner à la lumière
Qui la fascine à son insu,
Partout où ce beau front rayonne,
Un souffle d’amour environne
Celle par qui l’homme est conçu !


Un homme ! un fils, un roi de la nature entière !
Insecte né de boue, et qui vit de lumière ;
Qui n’occupe qu’un point, qui n’a que deux instants,
Mais qui de l’Infini par la pensée est maître,
Et, reculant sans fin les bornes de son être,
S’étend dans tout l’espace et vit dans tous les temps !

Il naît, et d’un coup d’œil il s’empare du monde !
Chacun de ses besoins soumet un élément ;
Pour lui germe l’épi, pour lui s’épanche l’onde,
Et le feu, fils du jour, descend du firmament.

L’instinct de sa faiblesse est sa toute-puissance ;
Pour lui l’insecte même est un objet d’effroi :
Mais le sceptre du globe est à l’intelligence ;
L’homme s’unit à l’homme, et la terre à son roi !