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COMMENTAIRE


DE LA SIXIÈME HARMONIE




Ma famille possédait dans les montagnes de la Bourgogne une terre d’une vaste étendue, au milieu des bois. Cette terre s’appelle Monculot ou Ursy. Le château, d’architecture italienne, du grand goût de Venise, de Bologne ou de la Brenta, semble construit sur un dessin de Pyranèse. Les fenêtres sont cintrées et décorées de balcons ; le toit, orné de balustrades de pierre ; les escaliers, dignes d’un palais ; les appartements, immenses. Quinze croisées hautes et larges les éclairent. On dirait d’une grande abbaye rebâtie dans le dix-huitième siècle sur la place et sur les ruines de quelque ermitage au fond des forêts. Les jardins échancrés dans les bois n’ont pour enceinte que les rochers et les chênes sur lesquels ils ont été conquis. Quoique sur un site très-élevé, sept grandes sources d’eau de roche les arrosent, et forment des bassins qui portent bateau, ou des rigoles murmurantes qui vont se perdre dans une gorge étroite, rapide, profonde, d’où elles tombent dans une vallée d’Arcey. Cette vallée, qui prend son nom d’une ancienne citadelle romaine élevée, dit-on, par César, est entièrement ensevelie dans les bois.