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ET RELIGIEUSES.

L’ombre des monts lointains se déroule et recule,

Comme un vêtement replié.

Ses lambeaux, déchirés par l’aile de l’aurore,
Flottent livrés aux vents dans l’orient vermeil ;
La pourpre les enflamme, et l’iris les colore ;
Ils pendent en désordre aux tentes du soleil,
Comme des pavillons quand une flotte arbore
Les couleurs de son roi dans les jours d’appareil.


Sous des nuages de fumée,

Le rayon va pâlir sur les tours des cités,
Et sous l’ombre des bois les hameaux abrités,
Ces toits par l’innocence et la paix habités,

Sur la colline embaumée,
De jour et d’ombre semée,

Font rejaillir au loin leurs flottantes clartés.

Le laboureur répond au taureau qui l’appelle,
L’aurore les ramène au sillon commencé ;
Il conduit en chantant le couple qu’il attelle,
Le vallon retentit sous le soc renversé ;

Au gémissement de la roue

Il mesure ses pas et son chant cadencé ;
Sur sa trace en glanant le passereau se joue,

Et le chêne à sa voix secoue

Le baume des sillons que la nuit a versé.


L’oiseau chante, l’agneau bêle ;
L’enfant gazouille au berceau ;
La voix de l’homme se mêle
Au bruit des vents et de l’eau ;