C’était en 1822.
J’avais passé le cap des tempêtes que tout homme doit passer dans sa jeunesse, avant d’arriver à ces espaces calmes et lumineux de la vie où l’on goûte quelques années de sérénité. J’étais marié, je venais d’être père ; deux enfants balbutiaient en me souriant dans leur berceau aux pieds de leur jeune mère. J’avais dans la diplomatie un emploi régulier et actif de mes facultés, conforme à mes goûts. J’habitais l’Italie, cette seconde patrie de mes yeux et de mon cœur. Tout était repos d’esprit, silence des passions, hymne intérieur en moi et autour de moi. Mon père, ma mère, mes sœurs, mes amis d’enfance ou de jeunesse, vivaient encore tous, et multipliaient mon bonheur en s’y intéressant. J’avais retrouvé dans ce bonheur la première piété inspirée à ses enfants par notre mère. Je ne discutais plus avec moi-même la foi du berceau. J’éprouvais une grande douceur à croire, à adorer, à prier, à jouir, dans la langue à laquelle les vertus et les grâces de cette mère donnaient tant de charme, tant d’élévation. Je conçus