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DE SOCRATE.

Que l’Océan, frappant sa rive épouvantée,
Avec ses flots grondants roule une âme irritée ;
Que notre air embaumé volant dans un ciel pur
Est un esprit flottant sur des ailes d’azur ;
Que le jour est un œil qui répand la lumière ;
La nuit, une beauté qui voile sa paupière ;
Et qu’enfin dans le ciel, sur la terre, en tout lieu,
Tout est intelligent, tout vit, tout est un dieu.





» Mais, croyez-en, amis, ma voix prête à s’éteindre :
Par delà tous ces dieux que notre œil peut atteindre,
Il est sous la nature, il est au fond des cieux
Quelque chose d’obscur et de mystérieux
Que la nécessité, que la raison proclame,
Et que voit seulement la foi, cet œil de l’âme !
Contemporain des jours et de l’éternité !
Grand comme l’infini, seul comme l’unité !
Impossible à nommer, à nos sens impalpable !
Son premier attribut, c’est d’être inconcevable !
Dans les lieux, dans les temps, hier, demain, aujourd’hui,
Descendons, remontons, nous arrivons à lui !
Tout ce que vous voyez est sa toute-puissance,
Tout ce que nous pensons est sa sublime essence !
Force, amour, vérité, créateur de tout bien,
C’est le dieu de vos dieux ! c’est le seul ! c’est le mien !…





» — Mais le mal, dit Cébès, qui l’a créé ? ― Le crime :
Des coupables mortels châtiment légitime,