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Vagues qui, vous gonflant comme un sein qui respire,
Embrassez mollement le sable ou le navire !
Harmonieux concerts de tous les éléments !
Bruit, silence, repos, parfums, ravissements !
Nature enfin, adieu !… Ma voix en vain t’implore,
Et tu t’évanouis au regard qui t’adore.
Mais la mort de plus près va réunir à toi
Et ce corps, et ces sens, et ce qui pense en moi ;
Et, les rendant aux flots, à l’air, à la lumière,
Avec tes éléments confondre ma poussière.
Oui, si l’âme survit à ce corps épuisé,
Comme un parfum plus vif quand le vase est brisé,
Elle ira… »


XLIV


Elle ira… » Mais l’airain, comme une voix qui pleure,
Des heures d’un mourant frappe la dernière heure…
De sa couche funèbre Harold entend, hélas !
Résonner dans la nuit cet appel du trépas ;
Et, rappelant de loin son âme évanouie,
Compte les tintements de sa lente agonie.
D’un côté de son lit, debout, le saint vieillard
Élève vers le ciel son sublime regard,
Et, tenant dans ses mains une torche de hêtre,
Ressemble au temps qui voit l’éternité paraître :
De l’autre, entre ses doigts pressant sa froide main,
Adda, sous ses baisers la réchauffant en vain,
S’abandonne en enfant à ses seules alarmes ;
Ses cheveux sur son sein ruissellent de ses larmes,