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son serment à la constitution, l’obligeaient de défendre, puisque la royauté faisait elle-même partie de cette constitution. Le roi le pouvait d’autant plus qu’aucune des pièces de l’armoire de fer ne prouvait directement un concert avec les puissances étrangères contre la France. Il ne trouva dans sa présence d’esprit ni l’un ni l’autre de ces deux systèmes de réponse, qui, s’ils n’eussent pas sauvé sa vie, auraient du moins préservé sa dignité. Au lieu de répondre en roi par le silence, ou en homme d’État par l’aveu hardi et raisonné de ses actes, il répondit en inculpé qui dispute l’aveu des faits. Il nia les notes, les lettres, les actes ; il nia jusqu’à l’armoire de fer, qui, scellée par lui-même, s’était ouverte pour révéler ses secrets. L’angoisse de son esprit ne lui laissa pas le temps de délibérer sur ce qu’exigeait de lui sa royauté ; peut-être l’entraînement d’une première dénégation le conduisit-il à tout nier, après avoir nié quelque chose, pour ne pas être convaincu en face de déguisement, ou plutôt pour ne pas compromettre ses serviteurs par ses aveux. Il voulut aussi sans doute réserver à ses défenseurs la liberté entière de leurs paroles. Enfin il pensa à sa femme, à sa sœur, à ses enfants, plus qu’il ne convenait peut-être dans un pareil moment. Il décolora ainsi sa défense. De ce jour il ne fut plus un roi qui luttait avec un peuple, il fut un accusé qui contestait avec des juges, et qui laissait intervenir des avocats entre la majesté du trône et la majesté de l’échafaud.