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II

L’Assemblée ne comptait pas trois cents membres présents dans la journée du 10 août. Les membres du côté droit et les membres du parti constitutionnel, pressentant qu’ils n’auraient qu’à sanctionner les volontés du peuple ou à périr, s’étaient abstenus de se rendre à la séance. Les Girondins et les Jacobins y assistaient seuls. Mais les rangs dégarnis de la représentation étaient peuplés d’étrangers, de pétitionnaires, de membres des clubs, d’hommes de travail, qui, assis pêle-mêle avec les députés, offraient à l’œil l’image de la confusion du peuple et de ses représentants, parlant, gesticulant, consultant, se levant avec les députés, comme sous l’empire d’un péril public qui identifiait l’Assemblée et les spectateurs. Dans une catastrophe qui intéresse au même degré toutes les âmes, personne ne regarde, tout le monde agit. Tel était l’aspect de l’Assemblée pendant et après le combat. Aucun discours ; des gestes soudains et unanimes ; des cris d’horreur ou de triomphe ; des serments renouvelés à chaque instant, comme pour se raffermir par le bruit d’une acclamation civique contre l’ébranlement du canon qui retentissait aux portes ; des députations nommées, essayant de sortir, refoulées dans la salle ; enfin des appels nominaux qui usaient l’heure en apparences d’action, et qui donnaient aux événements le temps d’éclore et d’enfanter une résolution décisive.