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XIV

Les nouvelles de la fuite de La Fayette, de l’entrée de l’armée coalisée sur le territoire, de la prise de Longwy et de la capitulation de Verdun, éclatèrent dans Paris comme des coups de foudre. La consternation se répandit sur tous les visages. Les étrangers à six marches de la capitale, la trahison dans l’armée, la lâcheté dans les villes, l’effroi dans les campagnes, la joie secrète dans le cœur des complices de l’émigration, un gouvernement renversé, une assemblée dissoute, une catastrophe dans un interrègne, une guerre étrangère dans une guerre civile ; jamais la France n’avait touché de plus près à ces jours sinistres qui présagent la décomposition des nations. Tout était mort en elle, excepté la volonté de vivre. L’enthousiasme de la patrie et de la liberté la soutenait. Abandonnée de tous, la patrie ne s’abandonnait pas elle-même. Il ne lui fallait que deux choses pour se sauver : du temps et une dictature. Du temps ? L’héroïsme de Dumouriez le lui donna. La dictature ? Danton la prit sous le nom de la commune de Paris. Tout l’intervalle qui s’écoula entre le 10 août et le 20 septembre ne fut que le gouvernement de Danton. Dominant à la commune, dont il servait, fomentait et dirigeait les volontés, il rapportait au conseil des ministres l’omnipotence qu’il puisait à l’hôtel de ville. Il y parlait en Marius qui ne voulait que des instruments dans