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wick fut trahi par son génie, ou il trahit lui-même la cause que les rois de l’Europe avaient remise dans ses mains. Il lassa l’ardeur de Frédéric-Guillaume à force de lui créer des obstacles. Il perdit dix jours à attendre ses renforts, comme s’il n’eût pas eu assez de soixante-douze mille hommes pour en attaquer dix-sept mille épars en faibles détachements sur une ligne de quinze lieues entre Sedan et Sainte-Menehould. Tout lui fut prétexte pour amortir sa propre armée. Le roi de Prusse, combattu entre son respect pour la vieille gloire militaire de son généralissime et l’évidence de ses fautes, se refusa trop longtemps à reconnaître que le cœur du duc de Brunswick retenait son bras, et qu’il attaquait avec répugnance une cause qui lui avait offert et qui lui offrait encore une couronne. Le duc voyait-il l’éventualité de cette couronne pour prix de ses ménagements envers la France révolutionnaire ? Sa lenteur autorise le soupçon, et sa retraite le confirme. Les causes naturelles sont insuffisantes à expliquer tant de faiblesse ou tant de complicité.


XIII

Pendant ces dix jours, Verdun tomba ; mais Dumouriez avait créé dans les défilés de l’Argonne des retranchements et une armée plus inexpugnables que les garnisons et les remparts dont l’ennemi s’emparait au prix du temps. L’armée coalisée ne parut que le 30 août sur les hauteurs du