Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/5

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en permanence que pour accepter les actes du peuple. Attitude passive et dégradée ; juste punition d’un corps souverain qui craignait la république sans oser lui résister, et qui la désirait sans oser la servir ! Le peuple, qui sentait la faiblesse de ses représentants, faisait tout seul la république ; mais comme le peuple fait tout quand il est sans gouvernement, par le désordre, par la flamme et par le sang. Il ne conservait envers l’Assemblée qu’une apparence de respect légal, comme pour avoir l’air de respecter quelque chose ; mais au fond il avait pris la dictature en prenant les armes. Les hommages qu’il affectait de rendre à la représentation n’étaient que les ordres respectueux qu’il lui donnait. Le véritable pouvoir était déjà à l’hôtel de ville, dans les commissaires de la commune. Le peuple l’avait senti. Il leur prêtait sa force. Il a le sentiment du droit suprême : le droit de ne pas périr. Les commissaires de la commune étaient plus que ses représentants : ils étaient le peuple de Paris lui-même. Aussi, la victoire à peine décidée par la retraite du roi et par l’assaut des Tuileries, tous les hommes populaires, mais prudents, qui avaient attendu le signe du destin pour se déclarer, volèrent à l’hôtel de ville, et s’installèrent au nom de leur opinion dans le conseil des vrais souverains de la circonstance.

Robespierre, qui réservait toujours, non sa personne, mais sa fortune, et qui s’était tenu caché à ses amis comme à ses ennemis pendant la conjuration et pendant le combat, parut dans la journée au conseil de la commune. Il y fut accueilli par ses disciples, Huguenin, Sergent, Panis, comme l’homme d’État de la crise et l’organisateur de la victoire.

Danton, après avoir rassuré sa femme et embrassé ses