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que la nation ne pouvait aliéner ; enfin, après avoir fait ressortir l’inanité des objections que l’on opposait aux assemblées primaires, auxquelles serait déféré l’appel au peuple, l’orateur girondin se retourna avec toute la puissance de sa dialectique et de sa passion contre Robespierre.

« L’intrigue, vous dit-on, sauvera le roi, car la vertu est toujours en minorité sur la terre. Mais Catilina fut une minorité dans le sénat romain ; et si cette minorité insolente avait prévalu, c’en était fait de Rome, du sénat et de la liberté. Mais dans l’Assemblée constituante Cazalès et Maury furent aussi une minorité ; et si cette minorité, moitié aristocratique, moitié sacerdotale, eût réussi à étouffer la majorité, c’en était fait de la Révolution, et vous ramperiez encore aux pieds de ce roi qui n’a plus de sa grandeur passée que le remords d’en avoir abusé. Mais les rois sont en minorité sur la terre, et pour enchaîner les peuples ils disent, comme vous, que la vertu est en minorité. Ainsi, dans la pensée de ceux qui émettent cette opinion, il n’y a dans la république de vraiment purs, de vraiment vertueux, de vraiment dévoués au peuple qu’eux-mêmes et peut-être une centaine de leurs amis qu’ils auront la générosité d’associer à leur gloire. Ainsi, pour qu’ils puissent fonder un gouvernement digne des principes qu’ils professent, il faudrait bannir du territoire français toutes ces familles dont la corruption est si profonde, changer la France en un vaste désert, et, pour sa plus prompte régénération et sa plus grande gloire, la livrer à leurs sublimes conceptions ! On a senti combien il serait facile de dissiper tous ces fantômes dont on veut nous effrayer. Pour atténuer d’avance la force des réponses