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république est fondée. La question fameuse qui vous occupe est tranchée par ce seul mot. Louis est détrôné par ses crimes, il a conspiré contre la république ; il est condamné, ou la république n’est point absoute. (Applaudissements.) Proposer de faire le procès à Louis XVI, c’est mettre la Révolution en cause. S’il peut être jugé, il peut être absous ; s’il peut être absous, il peut être innocent. Mais s’il est innocent, que devient la Révolution ? S’il est innocent, que sommes-nous, sinon ses calomniateurs ? Les manifestes des cours étrangères contre nous sont justes ; sa prison même est un sévice ; les fédérés, le peuple de Paris, tous les patriotes de l’empire français sont coupables ; et le grand procès pendant au tribunal de la nature depuis tant de siècles, entre le crime et la vertu, entre la liberté et la tyrannie, est enfin décidé en faveur du crime et du despotisme.

» Citoyens, prenez-y garde : vous êtes trompés ici par de fausses notions. Les mouvements majestueux d’un grand peuple, les sublimes élans de la vertu se présentent à nous comme les éruptions d’un volcan et comme le renversement de la société politique. Lorsqu’une nation est forcée de recourir au droit de l’insurrection, elle rentre dans l’état de nature à l’égard du tyran. Comment celui-ci pourrait-il invoquer le pacte social ? Il l’a anéanti ! Quelles sont les lois qui le remplacent ? Celles de la nature : le salut du peuple. Le droit de punir le tyran et celui de le détrôner, c’est la même chose ; l’un ne comporte pas d’autre forme que l’autre. Le procès du tyran, c’est l’insurrection ; son jugement, c’est la chute de sa puissance ; sa peine, celle qu’exige la liberté du peuple. Les peuples lancent la foudre : voilà leur arrêt ; ils ne condamnent pas les rois ; ils les sup-