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que l’œil sur un secret. Roland ne songea pas à l’immense responsabilité qu’appellerait sur lui une découverte dont il écartait tous les témoins. Il n’appela point pour lever ce scellé les membres du comité de la Convention ; il fit monter Gamain seul avec lui dans sa voiture, se rendit aux Tuileries, força la porte de fer, recueillit les papiers que l’armoire contenait, et porta ces pièces au ministère de l’intérieur pour les examiner avant de les déposer à la Convention.

À l’annonce de la découverte de ce trésor d’accusations, un cri de joie s’éleva dans Paris, un murmure sourd gronda dans la Convention contre la témérité du ministre. Tous les partis s’accusèrent mutuellement d’avance de quelques complicités occultes dont l’armoire de fer recélait les preuves contre leurs chefs. Tous tremblèrent que Roland n’eût, à son gré, trié ces témoignages de trahison. Tous, à l’exception des Girondins, lui firent un crime de son impatience et d’avoir substitué la main d’un ministre à l’œil de la nation dans l’examen d’un dépôt de manœuvres et de trahisons contre elle. Bien que Roland eût apporté dans la journée les papiers de l’armoire de fer sur le bureau du président, le fait d’avoir assisté seul à leur découverte et de les avoir parcourus avant de les livrer le rendait suspect de soustraction et de partialité. La Convention chargea son comité des douze de lui faire un rapport sur ces pièces et sur ceux de ses membres qui pourraient s’y trouver impliqués. Ces papiers contenaient le traité secret de la cour avec Mirabeau et les témoignages irrécusables de la corruption de ce grand orateur. La vérité sortait des murs du palais, où elle avait été scellée, pour venir accuser sa mémoire dans son tombeau. Barère, Merlin, Duquesnoy,