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pain et des prêtres. Ils revenaient à la Convention étaler leurs alarmes, leurs injures et leur impuissance. « On nous conduit à l’anarchie, disait Pétion. Nous nous déchirons de nos propres mains. Il y a des causes cachées à ces troubles. C’est dans les départements les plus abondants en blé que les troubles éclatent. Conspirateurs, qui avilissez la Convention, dites-nous donc ce que vous voulez de nous. Nous avons aboli toutes les tyrannies, nous avons aboli la royauté ; que voulez-vous de plus ? »

Les idées religieuses, froissées dans les consciences, agitaient au même moment les départements. Des séditions prenaient la croix pour étendard. Danton s’en émut. « Tout le mal n’est pas dans les alarmes sur les subsistances, dit-il à la Convention. On a jeté dans l’Assemblée une idée imprudente : on a parlé de ne plus salarier les prêtres. On s’est appuyé sur des idées philosophiques qui me sont chères, car je ne connais d’autre Dieu que celui de l’univers, d’autre culte que celui de la justice et celui de la liberté. Mais l’homme maltraité de la fortune cherche des jouissances idéales. Quand il voit un homme riche se livrer à tous ses goûts, caresser tous ses désirs, alors il croit, et cette idée le console, il croit que dans une autre vie les jouissances se multiplieront en proportion de ses privations dans ce monde. Quand vous aurez eu pendant quelque temps des officiers de morale qui auront fait pénétrer la lumière dans les chaumières, alors il sera bon de parler au peuple de morale et de philosophie. Mais jusque-là il est barbare, c’est un crime de lèse-nation, de vouloir enlever au peuple des hommes dans lesquels il espère encore trouver quelques consolations. Je penserais donc qu’il serait utile que la Convention fît une adresse pour persuader au