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VI

Un étranger siégeait parmi les membres de la Convention nationale : c’était le philosophe Thomas Payne. Né en Angleterre, mêlé aux luttes de l’indépendance américaine, ami de Franklin, auteur du Bon sens, des Droits de l’homme et de l’Âge de raison, son nom avait une grande autorité parmi les novateurs des deux mondes. Sa réputation lui avait servi de naturalisation en France. La nation qui pensait, qui combattait alors non pour elle seule, mais pour l’univers tout entier, reconnaissait pour compatriotes tous les zélateurs de la liberté et de l’égalité. Le patriotisme de la France, comme celui des religions, n’était ni dans la communauté de langue ni dans la communauté des frontières, mais dans la communauté des idées. Payne, lié avec madame Roland, avec Condorcet et Brissot, avait été élu par la ville de Calais. Les Girondins le consultaient et l’avaient introduit au comité de législation. Robespierre lui-même affectait pour le radicalisme cosmopolite de Payne le respect d’un néophyte pour des idées qui viennent de loin.

Payne avait été comblé d’égards par le roi lorsqu’il était venu à Paris pour implorer le secours de la France en faveur de l’Amérique. Louis XVI avait fait don de six millions à la jeune république. Payne n’eut ni la mémoire ni la convenance de sa situation. Ne pouvant s’énoncer en