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son cadavre aux pieds de Louis XVI et de lui dire : « Voilà ton ouvrage ! » Et cet homme ne serait pas justiciable du peuple !

» Je réprouve la peine de mort, continua Grégoire, et j’espère que ce reste de barbarie disparaîtra de nos lois. Il suffit à la société que le coupable ne puisse plus nuire. Vous le condamnerez, sans doute, à l’existence, afin que le remords et l’horreur de ses forfaits le poursuivent dans le silence de sa captivité. Mais le repentir est-il fait pour les rois ? L’histoire qui burinera ses crimes pourra le peindre d’un seul trait. Aux Tuileries, le 10 août, des milliers d’hommes étaient égorgés, le bruit du canon annonçait un carnage effroyable ; et ici, dans cette salle, il mangeait !… Ses trahisons ont enfin amené notre délivrance. L’impulsion est donnée au monde. La lassitude des peuples est à son comble. Tous s’élancent vers la liberté. Le volcan va faire explosion et opérer la résurrection politique du globe. Qu’arriverait-il si, au moment où les peuples vont briser leurs fers, vous proclamiez l’impunité de Louis XVI ? L’Europe douterait de votre intrépidité et les despotes reprendraient confiance dans cette maxime de notre servitude, qu’ils tiennent leur couronne de Dieu et de leur épée ! »

De nombreuses adresses des départements et des villes furent lues dans les séances suivantes, demandant toutes la tête de l’assassin du peuple. Le premier besoin de la nation ne semblait pas tant de se défendre que de se venger.