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forçait d’attendre, les yeux baissés, qu’il eût jeté sur son corps ses vêtements. Les ouvriers qui travaillaient à l’extérieur de la tour se répandaient en menaces contre le roi. Ils brandissaient leurs outils au-dessus de sa tête. Un d’eux leva sa hache sur le cou de la reine, et lui aurait abattu la tête si l’arme n’eût été détournée.

Un municipal éveilla un soir le Dauphin en le tirant avec rudesse par le bras pour s’assurer, disait-il, de la présence de l’enfant. La reine se précipita entre cet homme et son fils et perdit sa patience. Elle foudroya le commissaire de son regard. Pour la première fois la reine humiliée disparut, la mère se montra.

Une députation de la Convention vint visiter le Temple. Chabot, Dubois-Crancé, Drouet, Duprat, en faisaient partie. À l’aspect de Drouet, ce maître de poste de Sainte-Menehould qui, en reconnaissant le roi et en le faisant arrêter à Varennes, avait été la cause première de tous leurs malheurs, la reine, Madame Élisabeth et les enfants pâlirent et crurent voir ce mauvais génie qui avait apparu à Brutus la veille de Pharsale. Chabot et Drouet s’assirent irrespectueusement devant les femmes debout. Ils interrogèrent la reine, qui dédaigna de leur répondre. Ils demandèrent au roi s’il avait des réclamations à faire. « Je ne me plains de rien, répondit le roi ; je demande seulement qu’on fasse parvenir à ma femme et à mes enfants le linge et les vêtements dont vous voyez qu’ils ont besoin. » Les robes des princesses tombaient en lambeaux. La reine était obligée, pour que le roi ne fût pas vêtu de haillons, de rapiécer son habit pendant son sommeil. Toutes ces rigueurs et tous ces dénûments avaient été la conséquence des ordres de jour en jour plus sévères de la commune. Tison et sa femme dé-