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habillait elle-même l’enfant, lui faisait réciter ses prières et le portait dans son lit.

Quand il était couché, elle se penchait, comme pour l’embrasser une dernière fois, et lui soufflait à l’oreille une courte prière, que l’enfant répétait tout bas pour que les commissaires ne pussent l’entendre.

Cette prière, composée par la reine, a été retenue et révélée par sa fille : « Dieu tout-puissant, qui m’avez créé et racheté, je vous aime ! Conservez les jours de mon père et de ma famille ! Protégez-nous contre nos ennemis ! Donnez à ma mère, à ma tante, à ma sœur, les forces dont elles ont besoin pour supporter leurs peines ! »


XXV

Cette simple prière des lèvres d’un enfant demandant la vie pour son père et la patience pour sa mère était un crime dont il fallait se cacher.

L’enfant endormi, la reine faisait une lecture à haute voix pour l’instruction de sa fille et pour le délassement du roi et des princesses. C’était ordinairement dans un livre d’histoire qui reportait la pensée sur les grandes catastrophes des peuples et des souverains. Lorsque de trop fréquentes allusions à leur propre situation venaient à se présenter dans le cours du récit, la voix de la reine se voilait ou se trempait de larmes intérieures, et les prisonniers échangeaient entre eux un regard, comme si le livre, d’in-