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sa tourelle, tantôt des ouvrages latins, tantôt Montesquieu, tantôt Buffon, tantôt l’histoire, tantôt des récits de voyages autour du monde. Ces pages semblaient absorber complétement son esprit, soit que ce fût pour lui un moyen d’échapper à l’importune attention des commissaires toujours présents, soit qu’il cherchât en effet, dans la nature, dans la politique, dans les mœurs des peuples et dans leur histoire, des diversions à ses peines, des instructions pour son rang, ou des analogies avec sa situation. À neuf heures, sa famille descendait auprès de lui pour déjeuner. Le roi embrassait sa femme, sa sœur, ses enfants sur le front. Après le déjeuner, les princesses, dénuées de femmes de toilette, faisaient peigner leurs cheveux dans la chambre du roi par Cléry. Pendant ce temps, le roi donnait à son fils les premières leçons de grammaire, d’histoire, de géographie, de latinité, évitant avec soin, dans ces leçons, tout ce qui pouvait rappeler à l’enfant qu’il était né dans un rang au-dessus des autres citoyens, et ne lui donnant que les connaissances applicables à la destinée du dernier de ses sujets. On eût dit que ce père se hâtait de profiter de l’adversité et de l’éloignement des cours pour élever son fils, non en prince, mais en homme, et pour lui faire une âme adaptée à toutes les fortunes.