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sembla s’adoucir et leur douleur s’asseoir, comme pour respirer dans ce logement. Les captifs y prirent des habitudes régulières, qui rappelaient le cloître des rois emprisonnés de la première race.

Le père de famille survivait seul au roi dans Louis XVI. Les princesses oubliaient qu’elles avaient été reine, sœur ou fille de rois, pour se souvenir seulement qu’elles étaient femme, sœur ou fille, d’un mari, d’un frère, d’un père captif. Leurs cœurs se renfermaient tout entiers dans ces devoirs, dans ces tristesses, dans ces joies de la famille. Cette dynastie n’était plus qu’un ménage de prisonniers.

Le roi se levait avec le jour et priait longtemps à genoux au pied de son lit. Après sa prière, il s’approchait de la fenêtre ou de la réverbération de son foyer ; il lisait avec recueillement les psaumes dans le Bréviaire, recueil de prières et de cantiques indiqués pour chaque jour de l’année aux fidèles par la liturgie catholique. Il suppléait ainsi à l’habitude qu’avaient les rois d’assister tous les matins au sacrifice de l’autel dans leur palais. La commune lui avait refusé la présence d’un prêtre et les cérémonies de sa foi. Pieux, mais sans superstition et sans faiblesse, Louis XVI s’élevait à Dieu sans l’intermédiaire d’un autre homme, et se plaisait seulement à se servir pour ses prières des mots et des formes consacrés par la religion de sa race et de son trône. La reine et sa sœur se livraient aux mêmes pratiques. On les surprenait souvent les mains jointes, leurs livres de dévotion mouillés de larmes, priant auprès de leur lit : l’une, comme précipitée de sa hauteur, à genoux, par le coup de son désespoir ; l’autre, comme prosternée naturellement au pied du Dieu dont elle reconnaissait et baisait la main partout. Après ses prières, le roi lisait, dans