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XX

Les princesses et les enfants furent enfin réunis au roi dans la grande tour. Le second et le troisième étage de ce monument, divisés chacun en quatre pièces par des cloisons en planches, furent assignés à la famille royale et aux personnes chargées du service ou de la surveillance. La chambre du roi contenait un lit à rideaux, un fauteuil, quatre chaises, une table, une glace au-dessus de la cheminée. Le plafond était de toile. La fenêtre, garnie d’un treillis en barres de fer, était obscurcie par des plateaux de chêne disposés en entonnoir, qui interceptaient tout regard sur les jardins ou sur la ville, et qui ne laissaient voir que le ciel. La tenture de la chambre du roi, en papier peint, comme pour supplicier deux fois le regard du prisonnier, représentait l’intérieur d’une prison avec des geôliers, des chaînes, des fers et tout le hideux appareil des cachots. L’odieuse imagination de l’architecte Palloy avait ajouté avec raffinement les tortures de l’œil à celles de la réalité.

L’appartement de la reine, au-dessus de celui du roi, était disposé avec la même avarice de lumière, d’air et d’espace. Marie-Antoinette couchait dans la même chambre que sa fille ; Madame Élisabeth dans une chambre obscure, à côté ; le geôlier Tison et sa femme dans un réduit contigu ; les municipaux dans la première pièce servant d’antichambre. Les princesses étaient obligées de traverser