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l’œil la même disposition de pièces, la même nudité de murs et le même délabrement de mobilier. Le vent y sifflait, la pluie y tombait à travers les vitres brisées, les hirondelles y volaient en liberté. Ni lits, ni tables, ni fauteuils, ni tentures. Un ou deux grabats pour les aides du concierge, quelques chaises dépaillées et quelque vaisselle de terre dans une cuisine abandonnée, formaient tout l’ameublement. Deux portes basses et cintrées, dont les moulures de pierre de taille imitaient un faisceau de colonnes surmontées de l’écusson brisé du Temple, donnaient entrée aux vestibules de ces deux tours.

De larges allées pavées circulaient autour du monument. Ces allées étaient séparées par des barrières en planches. Le jardin était souillé d’une végétation touffue de mauvaises herbes, sali de tas de pierres et de gravois, débris de démolitions. Une muraille haute et sombre comme le mur d’un cloître attristait cette enceinte en la renfermant de toutes parts. Cette muraille ne s’ouvrait qu’à l’extrémité d’une large avenue sans arbres sur la Vieille-Rue-du-Temple. Tels étaient l’aspect extérieur et la disposition intérieure de cette demeure, où les hôtes des Tuileries, de Versailles et de Fontainebleau, arrivaient à la tombée de la nuit. Ces salles désertes n’attendaient plus d’hôtes, depuis que les Templiers les avaient quittées pour aller au bûcher de Jacques Molay. Ces tours pyramidales, vides, froides et muettes pendant tant de siècles, ressemblaient moins à une demeure qu’aux chambres d’une pyramide, dans le sépulcre d’un Pharaon de l’Occident.