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ressemblerait à leurs violences, nous faire légaliser les assassinats de l’Abbaye.

» Je vous écris rarement. Pardonnez-moi. Ma tête est souvent remplie de pensées pénibles et mon cœur de sentiments douloureux. À peine me reste-t-il quelquefois assez de force morale pour remplir mes devoirs. Votre pensée est ma consolation. Étranger, vous le savez, à toute espèce d’ambition, n’ayant ni les prétentions de la fortune ni celles de la gloire, je ne forme pour moi qu’un seul désir, c’est de pouvoir un jour avec vous jouir dans la retraite du triomphe de la patrie et de la liberté ! »


XIX

L’accent de cette lettre avait la gravité, la tristesse et le désintéressement des pensées de Vergniaud. Boyer-Fonfrède et Ducos, ses deux jeunes amis, épanchaient leurs âmes par des confidences semblables dans le sein de leurs amis de Bordeaux. « Le département de la Gironde, écrivait en ce moment Ducos, doit beaucoup au zèle et à l’activité de cet excellent jeune homme (Fonfrède, son beau-frère et son ami). S’il continue, comme je l’espère, à marcher dans sa carrière d’un pas ferme, la république tout entière lui aura de grandes obligations. — Pourquoi, mon ami, m’appelles-tu silencieux ? Si ton reproche porte sur mon éloignement de la tribune, je te répondrai que quand on a peu de respect pour sa propre raison et beau-