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despote ; notre première pensée est d’élever à sa place un monument à la liberté. Les citoyens qui meurent en défendant la patrie sont au second rang. Ceux-là sont au premier qui meurent pour l’affranchir au dedans. »

Enfin le Prussien Anacharsis Clootz, philosophe errant pour semer sa doctrine sur la terre avec sa parole, sa fortune et son sang, fit entendre au nom du genre humain à l’Assemblée nationale le premier écho du 10 août dans l’âme des peuples impatients de leur servitude. Clootz poussait la passion de l’humanité jusqu’au délire. Mais ce délire était celui de l’espérance et de la régénération. Les sceptiques le trouvaient ridicule, les patriotes le trouvaient banal, les politiques l’appelaient utopiste. Cependant Clootz ne se trompait que d’heure. Les utopies ne sont souvent que des vérités prématurées. Les âmes, ébranlées par la secousse du moment et fanatisées d’espérance, s’ouvraient aux perspectives les plus idéales. Le philosophe fut écouté avec complaisance, et les idées consolantes qu’il faisait briller comme un arc-en-ciel sur cet horizon de sang suspendirent quelques instants la lutte des partis et la hache des assassins.


XVI

Après cette seconde journée, la famille royale fut reconduite aux Feuillants. Les témoignages de pitié et d’attachement des hommes de son escorte alarmèrent la commune