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Mais la nature l’avait créé pour remuer des idées plutôt que des hommes. Sa taille petite et grêle, sa figure méditative et concentrée, la pâleur et l’ascétisme de ses traits, la gravité mélancolique de sa physionomie, l’empêchaient de répandre au dehors l’âme antique qui brûlait au dedans. Il avait dans la Convention plus d’influence que d’action. Il inspirait, il n’agitait pas. Il avait besoin de la solitude et du silence de son cabinet pour s’échauffer. Sa pensée était comme ces feux de lampe qui ne brillent que dans l’intérieur des murs, et que les grands souffles de l’air libre font vaciller et éteignent. Mais il retrouvait toute son intrépidité dans le recueillement, où Vergniaud et Gensonné venaient chaque jour s’éclairer à son génie.


IV

Telle était l’irritation entre les partis et les hommes, quand Brissot, Vergniaud, Condorcet et leurs amis décidèrent Roland à apporter à la Convention son rapport sur la situation de Paris. Le combat y était franchement offert aux factions. Il fut lu à la séance du 29 octobre. Ce rapport, favorablement écouté par la majorité, intimida Marat, Robespierre, Danton lui-même, et rendit la confiance aux Girondins. Les fédérés des départements se présentèrent le lendemain à la barre, et demandèrent que l’Assemblée réprimât les agitateurs de Paris et fît prévaloir le gouvernement national sur l’usurpation de quelques scélérats. Ils