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tout, excepté moi ! » Le misérable sait qu’il ne peut devenir grand qu’en restant seul ! »

Marat, de son côté, accusa, non sans vraisemblance, les Girondins de fomenter des troubles dans Paris pour trouver dans ces troubles mêmes l’occasion d’une réaction contre la commune. Un détachement d’émigrés prisonniers de guerre traversa en effet Paris en plein jour, précédé d’un trompette sonnant la marche et escorté seulement de quelques soldats, comme pour provoquer l’émotion et la vengeance des faubourgs. Plus de vingt mille hommes de troupes de ligne ou de fédérés des départements furent rassemblés sous différents prétextes dans Paris, ou au camp sous Paris. Les enrôlements patriotiques continuèrent dans la ville et purgèrent la capitale de plus de dix mille prolétaires, licenciés de la sédition, qui partaient pour la frontière. La commune rendit compte non du sang versé, mais des prisonniers et des dépouilles qu’elle avait accumulés dans ses dépôts depuis le 10 août. Indépendamment des victimes de cette journée, et des huit ou dix mille détenus que les assassins de septembre avaient immolés dans les prisons, quinze cents nouveaux prisonniers pour crime de contre-révolution avaient été écroués dans les différentes geôles de Paris. Sur ce nombre, la commune seule en avait décrété d’arrestation arbitraire près de quatre cents. Les prisons des départements ne suffisaient plus aux incarcérations. Toutes les villes convertissaient d’anciens monastères en maisons de force.

La municipalité de Paris se recomposa, et les élections pour nommer un maire attestèrent l’immense majorité du parti de l’ordre dans les sections, quand elles n’étaient pas intimidées par les agitateurs qui les dominaient. Pétion,