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avait besoin pour préparer ses conquêtes. L’habileté diplomatique qu’il avait acquise en traitant jadis avec les factions des confédérés en Pologne lui rendit facile le maniement des factions révolutionnaires à Paris. Son génie jouait avec les intrigues, et le fil de son ambition mêlé à toutes, sans se perdre dans aucune, lui donnait une chance dans la trame de tous les partis. Marat seul poursuivait Dumouriez de ses menaces et de ses accusations anticipées.

Dumouriez, de son côté, méprisait Marat. Mais celui-ci bravait la faveur publique qui entourait Dumouriez, et s’attachait, comme les insulteurs gagés de Rome, aux pas du triomphateur. Le général avait fait désarmer et punir un bataillon républicain qui avait massacré des émigrés prisonniers de guerre à Rethel. Un certain Palloy, architecte, était lieutenant-colonel de ce bataillon. Palloy avait trempé dans les excès de ses soldats. Destitué par Beurnonville, le lieutenant et l’ami de Dumouriez, Palloy était revenu se plaindre à Paris.

C’était un homme qui jetait son nom dans tout pour le faire retentir. Il avait fait une industrie de l’enthousiasme, en démolissant la Bastille et en vendant les pierres de cette forteresse aux patriotes comme des reliques et des dépouilles du despotisme. Il était ami de Marat. Marat prit sa cause en main. Il fit nommer par les Jacobins une commission d’enquête composée de Bentabolle, vociférateur de clubs ; de Montaut, aristocrate de sang, qui rachetait sa naissance par son exaltation démagogique, et de lui-même, pour examiner cette affaire, gourmander Dumouriez et venger Palloy.

Le général ayant refusé de les recevoir, Marat et ses deux collègues harcelèrent Dumouriez jusqu’au milieu d’une