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brigands. Que les amis de la patrie soient avertis ! Si je tombe sous les coups des assassins, ils savent à qui doivent remonter le crime et la vengeance ! » Les tribunes de la Convention, remplies de ce que les sections avaient de plus violent, soutenaient Marat du regard et du geste. Un ami de Brissot ayant voulu sortir de la salle avant la fin de la séance, l’officier de garde l’en empêcha. « Gardez-vous de vous montrer à la foule, lui dit-il, elle est pour Marat. Je viens de la traverser. Elle fermente. Si le décret d’accusation est porté contre l’ami du peuple, il y aura des têtes abattues ce soir. »


XXVI

Telle fut la première démonstration des Girondins. Mal préparée et mal soutenue par les principaux orateurs, bornée dans son plan, indécise et avortée dans son résultat, elle ne constata pas leur empire. Robespierre en sortit plus populaire, Danton plus important, Marat plus impuni. En rejetant tout l’odieux de l’anarchie sur Marat, les Girondins avaient essayé de déshonorer l’anarchie ; mais ils avaient grandi Marat. Cet homme se vantait de leur haine et s’illustrait de leurs coups. Il devenait l’idole du peuple en se présentant à lui comme son martyr. La pitié s’ajoutait à sa popularité. Le rôle de cet homme appelle un regard.

Marat n’avait point de patrie. Né au village de Baudry près de Neuchâtel, de parents obscurs, dans cette Suisse