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XVI

La colère et l’impatience des jeunes Girondins ne firent aucune de ces réflexions. Ils se réunirent chez Barbaroux, ils s’échauffèrent de leurs propres préventions, ils résolurent d’attaquer soudainement et corps à corps la tyrannie de Paris dans la personne et sous le nom de Robespierre. En rejetant sur lui seul tout l’odieux de cette tyrannie, ils avaient l’avantage de laisser de côté Danton, qu’ils redoutaient beaucoup plus. Ils croyaient ainsi attaquer la commune par le plus vulnérable de ses triumvirs, et ne doutaient pas d’en triompher aisément. Quelques-uns de leurs amis, plus âgés et plus temporisateurs, tels que Brissot, Sieyès et Condorcet, leur conseillèrent d’ajourner l’attaque et d’attendre qu’un conflit inévitable et prochain s’élevât entre la commune et la Convention. Les plus animés répondirent que donner du temps à une faction, c’était lui donner des forces ; que le courage était toujours la meilleure politique ; qu’il était habile d’arracher dès le premier jour la république aux factieux qui voulaient la saisir au berceau ; qu’il ne fallait pas laisser à l’indignation de la France contre les égorgeurs de septembre le temps de se calmer ; qu’il fallait compromettre dès le premier moment la majorité de la Convention contre les hommes de sang qui menaçaient de tout asservir, et que d’ailleurs il y avait en eux quelque chose de plus déterminant que la politique, c’était le senti-