Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lebas, Saint-Just, David, Couthon, Buonarotti, patriote toscan descendant de Michel-Ange ; Camille Desmoulins, un nommé Nicolas, imprimeur du journal et des discours de l’orateur ; un serrurier nommé Didier, ami de Duplay ; enfin madame de Chalabre, femme noble et riche, enthousiaste de Robespierre, se dévouant à lui comme les veuves de Corinthe ou de Rome aux apôtres du culte nouveau, lui offrant sa fortune pour servir à la popularisation de ses idées, et captant l’amitié de la femme et des filles de Duplay pour mériter un regard de Robespierre.

Là, on s’entretenait de la Révolution. D’autres fois, après une courte conversation et quelques badinages avec les jeunes filles, Robespierre, qui voulait orner l’esprit de sa fiancée, faisait des lectures à la famille. C’était le plus souvent des tragédies de Racine. Il aimait à accentuer ces beaux vers, soit pour s’exercer lui-même à la tribune par le théâtre, soit pour élever ces âmes simples au niveau des grands sentiments et des grands caractères de l’antiquité. Il sortait rarement le soir. Il conduisait deux ou trois fois par an madame Duplay et ses filles au spectacle. C’était toujours au Théâtre-Français et à des représentations classiques. Il n’aimait que les déclamations tragiques qui lui rappelaient la tribune, la tyrannie, le peuple, les grands crimes, les grandes vertus, théâtral jusque dans ses rêves et dans ses délassements.

Les autres jours, Robespierre se retirait de bonne heure dans sa chambre, se couchait et se relevait ensuite pour travailler dans la nuit. Les innombrables discours qu’il a prononcés dans les deux Assemblées nationales et aux Jacobins, les articles rédigés pour son journal pendant qu’il en eut un, les manuscrits plus nombreux encore des dis-