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VIII

Dans le parti opposé, une certaine hésitation trahissait l’inquiétude. Les séances des Jacobins depuis quelque temps étaient peu suivies et insignifiantes. Les membres nouveaux de la Convention ne s’y faisaient pas inscrire. Ils semblaient craindre de compromettre leur caractère et leur indépendance dans une affiliation suspecte de violence et d’usurpation. Pétion et Barbaroux y luttaient avec avantage contre Fabre d’Églantine et Chabot. Marat n’agitait que les plus basses couches de la populace. Il était plutôt le scandale éclatant de la Révolution qu’une force révolutionnaire. Il dépopularisait la commune en y siégeant. Danton lui-même semblait intimidé par l’approche de la Convention. Son passé pesait sur son génie. Il aurait voulu le faire oublier et surtout l’oublier lui-même. Tout ce qui lui rappelait les journées de septembre lui était importun et douloureux. Homme de clairvoyance et comme inspiré du génie inculte du gouvernement, il sentait que le rôle de chef d’une faction démagogique à l’hôtel de ville de Paris était un rôle court, précaire, subalterne, indigne de la France et de lui. La direction d’une insurrection, des proscriptions atroces et le gouvernement sanglant d’un interrègne de six semaines ne satisfaisaient pas son ambition.

Pour imposer sa dictature durable à la nouvelle Assemblée, il fallait à Danton une de ces deux choses : l’armée