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Vergniaud d’effeuiller dans son verre, à la manière des anciens, quelques roses du bouquet qu’elle portait ce jour-là. Vergniaud tendit son verre, fit nager les feuilles de rose sur le vin et but ; puis se penchant vers Barbaroux avant de se rasseoir : « Barbaroux, lui dit-il à demi-voix, ce ne sont pas des roses, mais des branches de cyprès qu’il fallait effeuiller dans notre vin ce soir. En buvant à une république dont le berceau trempe dans le sang de septembre, qui sait si nous ne buvons pas à notre mort ? N’importe, ajouta-t-il, ce vin serait mon sang, que je boirais encore à la liberté et à l’égalité ! — Vive la république ! » s’écrièrent à la fois les convives.

Cette image sinistre attrista, mais ne découragea pas leurs âmes. Ils étaient prêts à tout accepter de la Révolution, même la mort ! L’avenir allait bientôt prouver qu’ils pouvaient en accepter même le crime !


III

Les Girondins écoutèrent, après le dîner, les vues que Roland, assisté de sa femme, avait rédigées pour la Convention sur l’état de la république. Ce projet posait nettement la question entre la France et la commune de Paris. Roland, comme ministre de l’intérieur, en appelait à la Convention des désordres de l’anarchie et des crimes qui avaient signalé l’interrègne des lois depuis le 10 août jusqu’à l’ouverture de la nouvelle assemblée, et demandait