Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 11.djvu/221

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de langueur et déplorant la sinistre renommée dont il avait déjà taché son nom par tant de meurtres provoqués ou sanctionnés, le conjurait avec larmes de sortir d’un tourbillon qui emportait à de tels vertiges, et d’expier les torts ou les malheurs de son ministère par sa retraite. Danton aimait et respectait la première compagne de sa jeunesse ; il écoutait sa voix comme un oracle de tendresse, et regardait avec inquiétude les deux enfants qu’elle allait, en mourant, laisser sans mère. Il aspirait à se recueillir un moment, fier d’avoir sauvé les frontières, honteux du prix que son patriotisme égaré lui avait demandé dans les journées de septembre.


III

Une impatience visible se trahissait dans les premières paroles, dans l’attitude et dans le silence même de la Convention. Les Français ne remettent jamais au lendemain ce que le jour peut faire. Une pensée était dans tous les esprits, dans tous les regards, sur toutes les lèvres ; elle ne pouvait tarder à éclater. La première question à traiter était celle de la royauté ou de la république. La France avait pris son parti. L’Assemblée ne pouvait suspendre le sien. Elle réfléchissait seulement à la grandeur de l’acte. Il y a des mots qui contiennent la vie ou la mort des peuples ; il y a des minutes qui décident de l’avenir du genre humain. La Convention était sur le seuil de ses destinées inconnues : elle n’hésitait pas, elle se recueillait.