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dant la nuit le corps du général Chazot, qui se croyait attaqué par toute l’armée ennemie. Les fuyards, s’échappant dans toutes les directions, étaient allés semer jusqu’à Reims le bruit d’une déroute complète de l’armée française. Le général, ayant fait ramener par sa cavalerie quelques-uns uns de ces semeurs de panique, les dépouilla de leur habit d’uniforme, leur fit raser les cheveux et les sourcils et les renvoya du camp, en les déclarant indignes de combattre pour la patrie. Après cette exécution, qui punissait la lâcheté par le mépris et qui rappelait les leçons de César à ses légions, Dumouriez reprit sa marche et entra le 17 dans son camp de Sainte-Menehould.


V

Le camp de Sainte-Menehould, dont le génie de Dumouriez fit l’écueil des coalisés, semble avoir été dessiné par la nature pour servir de citadelle à une poignée de soldats patriotes contre une armée innombrable et victorieuse. C’est un plateau élevé, d’environ une lieue carrée, précédé, du côté qui fait face à l’ennemi, d’une vallée creuse, étroite et profonde, semblable au fossé d’un rempart ; protégé sur ses deux flancs, à droite par le lit de l’Aisne, à gauche par des étangs et des marais infranchissables à l’artillerie. Le derrière de ce camp est assuré par des branches marécageuses de la rivière d’Auve. Au delà de ces eaux bourbeuses et de ces frontières s’élève un ter-