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par leurs troupes, des journalistes du parti de la cour, enfin ces vingt-sept officiers du régiment de Cambrésis accusés d’avoir voulu surprendre la citadelle de Perpignan pour la livrer aux Espagnols, languissaient depuis plus d’un an dans ces prisons.

La légèreté des accusations, l’absence des preuves, l’éloignement des témoins, suspendaient ou amortissaient les jugements. La prévention, qui juge sans preuves et qui condamne ce qu’elle hait, s'impatientait de ces lenteurs. La commune, Marat, Danton, qui voulaient en finir, trouvèrent ces victimes toutes parquées pour l’assassinat. L’Assemblée, honteuse des égorgements du 2 septembre exécutés sous ses yeux et dont elle porterait la responsabilité, voulait soustraire soixante-deux détenus à la justice sommaire de la commune. Mais les maratistes répandirent dans le peuple que les prisons d’Orléans, transformées en séjour de délices et en foyer de conspirations par l’or du duc de Brissac, ouvriraient leurs portes au signal donné par les émigrés, et déroberaient à la nation sa vengeance. On parla d’un prochain enlèvement.

Sur ce seul bruit, deux cents Marseillais et un détachement de fédérés et d’égorgeurs commandés par le Polonais Lazouski partent pour Orléans, d’après un ordre secret des meneurs de la commune. Arrivés à Longjumeau, ils écrivent à l’Assemblée qu’ils sont en route pour ramener à Paris les prisonniers. L’Assemblée, inquiète, à la voix de Vergniaud et de Brissot, rend un décret qui défend à ces fédérés de disposer arbitrairement des prévenus ou des coupables promis à la seule vengeance des lois. Lazouski et ses satellites feignent d’obéir au décret. Ils répondent qu’ils vont à Orléans pour garder les prisonniers qu’on veut