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insensés à qui cette maison servait d’hospice, fut immolé sans distinction. L’économe, les aumôniers, les concierges, les scribes de l’administration, furent compris dans le massacre général. En vain la commune envoya des commissaires, en vain Pétion lui-même vint haranguer les assassins. Ils suspendirent à peine leur ouvrage pour écouter les admonitions du maire. À des paroles sans force, le peuple ne prête qu’un respect sans obéissance. Les égorgeurs ne s’arrêtèrent que devant le vide. Le lendemain, la même bande d’environ deux cent cinquante hommes armés de fusils, de piques, de haches, de massues, fait irruption dans l’hôpital de la Salpêtrière, hospice et prison à la fois. La Salpêtrière ne renfermait que des femmes perdues ; lieu de correction pour les vieilles, de guérison pour les jeunes, d’asile pour celles qui touchaient encore à l’enfance. Après avoir massacré trente-cinq femmes des plus âgées, ils forcent les dortoirs des autres, les obligent à assouvir leur brutalité, égorgent celles qui résistent, et emmènent en triomphe avec eux de jeunes filles de dix à douze ans, proie immonde de la débauche ramassée dans le sang.


XXI

Pendant que ces proscriptions consternaient Paris, l’Assemblée envoyait en vain des commissaires pour haranguer le peuple aux portes des prisons. Les égorgeurs ne suspendaient même pas leur travail pour prêter l’oreille à ces dis-