oublier. Ils avaient prolongé cependant et semé de piéges son interrogatoire, pour se faire un mérite de sa condamnation. On avait jeté M. de Montmorin à l’Abbaye ; son fils, presque enfant, l’y consolait. Enfermé dans une même salle avec d’Affry, Thierri, Sombreuil, gouverneur des Invalides, la fille de Sombreuil et Beaumarchais, qui riait encore sous les verrous, Montmorin avait supporté sa captivité avec calme dans les doux entretiens de ces anciens amis. L’élargissement de d’Affry et de Beaumarchais, que Manuel était venu chercher, la veille, avec madame de Saint-Brice et madame de Tourzel, lui donnait l’espérance d’une prochaine délivrance. Le tocsin du 2 septembre, le tumulte des cours, les cris des victimes, son fils arraché le matin de ses bras, le rejetèrent tout à coup de la confiance dans l’abattement. Son désespoir devint de la fureur. Il appelait ses ennemis pour les terrasser. Les cheveux épars, les yeux enflammés, les poings levés, il parcourait la chambre en lançant des imprécations aux brigands. Ses muscles tendus par la colère lui donnaient une force qui ébranlait les barreaux de fer de sa prison. Il broya sous ses doigts une table de chêne dont les planches avaient deux pouces d’épaisseur. Il fallut le tromper pour lui faire franchir le seuil du guichet. Il parut fier et l’ironie sur les lèvres en présence du tribunal. « Président, dit-il à Maillard, puisqu’il vous plaît de vous nommer ainsi, j’espère que vous me ferez amener une voiture pour me conduire à la Force, afin de m’éviter les insultes de vos assassins. » Maillard fit un signe de consentement. Montmorin s’assit un moment dans le guichet et vit juger quelques prisonniers. « La voiture qui doit vous conduire à votre destination est arrivée, » lui dit enfin le président. Au même instant, la porte de la cour s’ouvrit. Montmorin se
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